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Début
25
Aou
2017
 
Fin
29
Oct
2017
 
Lieu
Profondeville - Golf de Rougement

Chemin du Beau Valon, 45
5170 Profondeville
Contact
Jean-Michel François
081 775 525

Culture

Green 'Art 2017 - Fore - sculptures in situ de Pierre Courtois

Du 25 août au 29 octobre 2017, Green 'Art 2017 - Fore - sculptures in situ de Pierre Courtois, au Golf de Rougement, Chemin du Beau Valon, 45 à Profondeville.
Inauguration de l'exposition le jeudi 24 août 2017, à 18 heures 30, au Club House du Golf de Rougemont.

(plan d'accès : golfderougemont.be/plan-acces)

Cette édition de Green'Art, entièrement dédiée à Pierre Courtois, propose 4 œuvres et une exposition au Club House.

La mesure des choses par Olivier Duquenne, Historien de l'art

Le geste précis de l’arpenteur est l’écrin d’une évidence philosophique. Prendre la mesure des choses, c’est donner au jalon le pouvoir de rendre l’univers à notre portée. Le compas, l’équerre ou le cordeau sont les instruments qui offrent au système métrique la dignité de circonscrire pour mieux connaître. Celui qui aime la mesure connaît les mystères du nombre d’or, etvoilà que sa tâche laborieuse rappelle presque les mythologies d’antan. L’arpenteur est le juge des directions, le maître des distances ou l’arbitre des hauteurs. Mais la plus grande noblesse de la mesure est sans nul doute celle qui consiste à changer nos regards.

Le monde ne devient comprehensible que par notre désir inné de le circonscrire. C’est cette vérité que l’artiste Pierre Courtois tient pour le plus beau des traits d’union. Voilà maintenant plus de quarante ans que son œuvre plastique nous intrigue. En dépit de leur apparente étrangeté et de leurs multiples atours, ses œuvres n’ont jamais cessé de poursuivre qu’un seul objectif : faire du commensurable l’essentiel de tout. Les premiers dessins de l’artiste révélaient déjà d’étranges couches stratigraphiques. L’arpenteur posait, non sans humour, les premiers jalons de sa mémoire. Une mémoire qui sur plusieurs décennies s’énoncera en lignes, traits, drapeaux, cibles ou autres mires. Pensons à cette obsession que l’artiste voue aux boîtes de Pandore, à ses installations qui évoquent autant les fantasmes de Léonard de Vinci que l’univers de la couture.
 
Une intégration in-situ de Pierre Courtois ne prend de sens que par son adéquation au lieu. Ainsi le lieu n’est pas que l’espace d’un simple dépôt, il devient surtout le terrain d’une investigation philosophique. La configuration d’un terrain de golf a toujours fasciné l’artiste. Moins par amour du sport que pour ce qu’il représente symboliquement. Il est un espace où la beauté de la nature se plie harmonieusement aux multiples transformations voulues par l’homme. A vrai dire, un terrain de golf n’est pas qu’un lieu dévolu au sport, c’est surtout un espace rituel où le génie de la mesure s’exprime par l’évaluation des trajectoires. Le golfeur est un arpenteur dans toute la « mesure » du terme. Il jauge avec précision, évalue à propos et calcule avec logique. Pierre Courtois nous rappelle combien le vocabulaire de l’arpenteur entre en résonnance avec l’univers du golf. Pensons ici aux affections que l’artiste nourrit à l’endroit des tracés, des dénivelés entre deux points ou autres points de visée.

Voyez cette série de tiges d’acier peintes en noir et blanc, et qui se suivent au rythme de la célèbre suite du mathém­aticien Léonardo Fibonacci. Dans cette suite, tout nombre (à partir du troisième) est égal à la somme des deux précé­dents : 0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, etc. Pierre Courtois aime à souligner que si l’on divise un nombre avec son précédent, on s’approche du nombre d’or (1,618). Et l’artiste précise que plus on s’éloigne du départ de cette suite, plus on se rapproche de la « divine proportion ». Chaque tige évoque la trajectoire d’une balle dans les airs. Par le jeu des métaphores, l’installation rappelle aussi le golfeur qui ajuste la courbure de sa balle. Les tiges en noir et blanc traversent une succession de fines « portes en acier. Belle occasion d’évo­quer les préférences que l’artiste voue aux horizons circonscrits. Mais n’oublions pas que les portes évoquent aussi ce qui nous reste à traverser, ou à vivre.

Il y a aussi ces deux piquets verticaux qui scandent le terrain de golf. Ces jalons noir et blanc pourvus de cubes en plexiglas portent en eux une valeur éthique : celle du « mieux voir ». Chaque piquet est une invitation poétique à la lecture diffractée du monde. Bien-sûr ils peuvent évoquer ces pantomètres utilisés en arpentage et qui ont pour office de mesurer des angles et mener des perpendiculaires. Les cubes de plexiglas intégrés dans les piquets sont des prismes qui permettentune diffraction du paysage à 90°. Mais méfions nous du caractère trop scientifique des œuvres de Pierre Courtois, leur essentiel est de donner à voir pour mieux ressentir. Mais voilà qu’un autre objet énigmatique capte notre attention. Il est fait de deux plaques de métal percées en leur centre par des croix. Les plaques sont reliées entre elles par une équerre de lumière vive. Le plexiglas fluorescent évoque un « corps d’équerre » qui mesure poétique-ment les directions, hauteurs et distances. Le mystère magique de cette « équerre de visée » confine presque au totémisme.

Le golf de Rougemont accueille déci­demment d’étonnantes surprises. C’est le cas de ces divers « points de visée » alignés strictement sur une droite juste à hauteur de notre regard. Chaque module est pourvu d’une structure sur laquelle se trouve fixé deux triangles en plexiglas fluorescent. Les triangles sont disposés de façon à évoquer autant de fenêtres ouvertes sur le monde. Ils sont les « points de rencontre » entre notre désir de saisir l’univers et la beauté claire du mesurable. Reste à mentionner ces 7 mystérieux trépieds. Que d’univers distincts à convoquer ! Ils peuvent conjointement faire penser aux disciplines de l’arpentage de l’astronomie ou de l’alchimie. On les verrait volontiers dans les cabinets de curiosités des humanistes de la Renaissance. Pourtant, vouloir les iden­tifier ou leur trouver un sens concret est une tâche impossible. Comment analyser un objet dont l’allure savante s’ingénie à provoquer la migration de sa fonction utilitaire ? Voilà bien le sublime paradoxe de l’art de Pierre Courtois : parler aux étoiles, mais centimètre par centimètre.

Entrée libre

 

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